mardi 30 novembre 2010

Maurice Sendak, lumière et mystères

Chez Maurice Sendak, les petits garçons sont les rois du monde, ils commandent à la mer, aux nuages, aux animaux, et parfois à des flopées de monstres terrifiants. Ensuite les petits garçons mettent leur pyjama et vont s'asseoir pour manger leur soupe.

Avec Max et les Maximonstres, classique des classiques, on entre dans le rêve par un dessin à la fois limpide et mystérieux, la forêt referme derrière nous ses larges branches, on chemine derrière un roi enfant chevauchant des êtres immenses. Quand le rêve prend fin, l'image rétrécit, minuscule au creux de la page blanche.

Ce merveilleux album est dans presque toutes les écoles, parfois usé, détruit...C'est bien dommage.Paru en 1962 sous le titre Where the wild things are, cet album référait manifestement à la part sauvage qui dort en chaque enfant. Une video bricolée restitue cette histoire intemporelle.





L'école des loisirs a la bonne idée de rééditer la Mini-bibliothèque de Maurice Sendak,quatre minuscules volumes reliés toile et jaquettés dans une boîte de carton douce sous les doigts.


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Quatre comptines, philosophiques et enfantines:J'adore les Alligators (abécédaire), Ma soupe de poule au riz (calendrier),Pascal (conte moral en cinq chapitres), Un deux trois et caetera (livre à compter et décompter) Un régal.
Et une mine d'idées d'écriture pour la classe: pourquoi ne pas reprendre le schéma de petite collection en pliage à la façon de Célestine ?




Maurice Sendak est né en 1928, c'est un vieux petit garçon maintenant.
Il a choqué son siècle, apprivoisé pas mal de monstres, mais son univers reste un élément fondateur de la littérature de jeunesse.Son parcours vaut le détour.


Rien à voir, mais je parlerai bientôt de lui aussi, Georges Lemoine promène son oeil d'artiste et son appareil photo: c'est chez Ricochet et ça donne de quoi faire pour apprendre à regarder, c'est par ici.

jeudi 25 novembre 2010

N'exploitons pas Ponti à l'école...



« Sauf adoption ou recomposition familiale, les sœurs et les frères arrivent sous forme de bébé immédiatement après leur naissance. Ce sont alors des sœurs et des frères non finis dont on ne peut rien faire »

On ne saurait mieux dire la déception des frères et sœurs aînés à qui la cohorte des adultes bienveillants, voisins, parents, oncles, tantes, nourrices, enseignants, inconnus dans les transports et autres commerçants plein de jovialité répètent depuis des mois : « Alors, t’es content ? Maman va avoir un bébé ! » à l'arrivée d'un nourrisson dans la maison.

Sœurs et frères de Claude Ponti est un trésor. Encore un. Pour sa folie, bien sûr, pour le catalogue de ses habitants extraordinaires, ces êtres-valises aux yeux ronds qu’on a l’impression d’avoir toujours connus : Réglék-Kquerr carré de partout, Grotrouillon et sa tête cachée dans un pot de sable ambulant, Lépuisé Zélasse, Kili-Toultan-Partou (c’est moi), Soeuridéale (encore moi), Squouatt-Tabaigne (Esprit d’ablutions somnolentes. Immersion. Clapotis, c’est encore moi parfois)
Claude Ponti génère les sourires, ce livre posé sur mon bureau m’a valu une grosse récolte ces temps-ci, c’est toujours bon à prendre. Mais là où je le trouve magistral, c’est lorsqu’il évoque les sujets les plus désespérants : les albums de Ponti sont des livres qui soignent.

Il a tout dessiné, il a tout évoqué : la laideur, la solitude, l’abandon, la moquerie, la honte, la mort. Il rend supportable ce qui fait mal de son écriture pondérée et son dessin exubérant, bien au-delà des albums destinés à expliciter les choses qui font mal à longueur de collection. Il faut avoir vu le regard d’enfants dont on sait la vie chaotique sur les parents d’Oum Popotte ( in Le Chien Invisible) pour en prendre la mesure.

Dans ce dernier album, Soeurs et frères,Claude Ponti évoque aussi les sœurs et les frères morts avec les mots et les images qui aident … Mais dans la série qui donne le sourire, je recommande le couple Kollant-Minute, ( Esprit d’accompagnement forcé. Bébête. Surpuissance. Agglutinance).
Je m’y reconnais également.
En classe, les œuvres de Ponti sont accessibles à tous les niveaux de la maternelle au CM2, pas pour les « exploiter », juste pour les regarder, les lire et se laisser emporter.

L'école des loisirs, 21,50 €

dimanche 21 novembre 2010

Roald Dahl



Quel bonheur d'écouter les entretiens de France Culture cet après-midi, au programme:Roald Dahl, le renard rusé par Virginie Bloch-Lainé et Anne-Pascale Desvignes,le lien pour l'écouter est ici
"Le 6 septembre 2010, vingt ans après la mort de Roald Dahl, est sortie en Grande-Bretagne la première biographie autorisée de l’auteur de Charlie et la chocolaterie. Donald Sturrock, son auteur, a eu accès aux archives personnelles du romancier d’origine norvégienne et confirme que Dahl fut un agent du renseignement britannique, quelques mois au cours des cinq années joyeuses qu’il passa sur la côte Est des Etats-Unis, entre 1941 et 1946.C’est une nouvelle très réjouissante mais pas tellement surprenante, tant elle colle avec la vie de héros qu’a menée Roald Dahl. Après avoir été pilote de la RAF au Moyen-Orient, il a travaillé pour l’ambassade britannique à Washington et fréquenté des acteurs, des écrivains, des hommes politiques, les époux Roosevelt et par la même occasion la Maison Blanche, Ian Fleming, espion-écrivain dont il a scénarisé le roman On ne meurt que deux fois, Robert Altman … et plus tard, il a épousé l’actrice Patricia Neal, décédée cet été.



Gravement blessé physiquement pendant la guerre, Roald Dahl le fut aussi affectivement, dans son enfance, par la mort précoce de son père et d’une de ses sœurs à quelques mois d’intervalle. La vie a continué de ne pas épargner ce conquérant aventureux puisqu’il perdit une fille de sept ans et eut un fils lourdement handicapé après qu’un taxi renversa son landau. Nourri de ces mauvais coups, il a inventé pendant presque trente ans, du début des années 60 à la fin des années 80, des petits héros tout aussi aventureux et secoués par la vie que lui, souvent très intelligents, s’efforçant de se sortir le mieux possible des difficultés dans lesquelles les adultes les ont placés.


Mais Roald Dahl a imaginé aussi, dans des nouvelles destinées aux adultes, des séducteurs prétentieux, trop fiers de leur virilité pour qu’il n’y ait pas un loup quelque part ; des libidineux punis par là où ils ont péché ; une femme humiliée sexuellement par un amant-gynécologue sadique ; un policier assassiné par sa femme grâce à un coup de gigot congelé, et écrivit un roman hilarant sur la vie d’un obsédé sexuel tiré à quatre épingles. Sept de ses nouvelles furent adaptées à la télévision par Alfred Hitchcock. Les deux hommes étaient faits pour s’entendre.


Entre ces nouvelles - macabres ou sexuelles, voire les deux à la fois - où ceux qui jouent aux plus malins sont toujours perdants, et James et la grosse pêche, Le Fantastique Monsieur Renard ou Matilda, il n’y a qu’un pas. Roald Dahl balaie d’un revers de main la médiocrité et encourage ses lecteurs à se conduire en conquérants s’ils veulent avoir une chance de s’en sortir. Roald Dahl était du côté du renard contre celui des chasseurs. Il faut bien en passer par quelques filouteries pour survivre."

Dans cette émission j'ai spécialement apprécié les interventions de Gérard Guégan, romancier ( "Cité champagne" éd. Grasset, "Inflammables" éd. S. Wespieser) et Quentin Blake qui raconte sa collaboration avec RD.
Lorsqu'il écrit pour les enfants, Dahl n'élude pas la dureté de la vie, la cruauté des situations. Il ne présente pas l'enfance comme un jardin de roses, ses jeunes lecteurs peuvent reconnaître des souffrances et des peurs intimes dans ses histoires. Mais il sait terminer ses histoires sans laisser les lecteurs dans l'angoisse: ses héros sont préservés grâce à leur courage et leur audace. Son écriture est morale malgré la drôlerie et la cruauté parfois débridée, l'ennemi chez lui, c'est la médiocrité.

Concernant la classe, Gallimard a publié une version poche illustrée des photos du récent film: Fantastique maître Renard. Cela ne remplace pas les illustrations de Quentin Blake mais complète utilement une bibliothèque de classe: la diversité des illustrations rend son épaisseur à l'écriture.



Pour moi, tout est bon chez Dahl, Matilda reste un texte précieux, particulièrement aidant pour des enfants peinant à trouver leur place à l'école.


Bref, j'aime énormément cet auteur...

mardi 2 novembre 2010

Réfléchir et s'émouvoir




La dernière année, ou pourquoi et comment le Père Noël décida d'arrêter et pourquoi il ne recommença jamais, de Thierry Lenain illustré par Benoît Morel. Une histoire de Père Noël, mais là c'est le commencement de la fin, une version de la vraie vie du vrai Père Noël proposée aux enfants.On rencontre un PN désabusé, en fin de carrière, confronté à des usurpateurs d'identité et à l'aspect éminemment commercial des fêtes de fin d'année. On se sent partir vers une biographie dépressive du bonhomme rouge...et puis non, l'auteur fait une autre proposition. La suite questionne et émeut. Le livre de petit format est blanc cassé, rouge et noir, le papier de qualité, les illustrations émouvantes et justes (on peut dire cela? Tant pis, je le dis, elles sont en adéquation avec l'écriture, je les trouve justes et belles). A lire avec les enfants qui ont fini d'y croire (cycle2), à donner aux cycle 3...Un très bon support de débat et apparemment une collection qui invite à penser chez Oskar: "Trimestre, chaque année 4 titres, 4 auteurs, 4 illustrateurs, 4 coups de coeur pour s'émouvoir" Affaire à suivre...



Toujours pour les cycles 2 et 3, Le livre des Croc, crunch, slurp! de Charles et Maureen Clark, illustré par Sue Shields. 'Gallimard jeunesse) On avait déjà testé en classe Le livre des Gloup et autres onomatopées , des mêmes auteurs. En plus du caractère gagesque et des pop up très inventifs, on avait repéré une entrée vraiment pédagogique pour présenter la digestion en classe. Celui-ci s'attache à l'aspect diététique et à l'origine des aliments, ce qui n'est pas inintéressant aujourd'hui où les familles se fournissent essentiellement au supermarché.Les courts segments de lecture sur des rabats ou des pochettes peuvent convenir à certains élèves, un bon complément au manuel de sciences.



Pour les maternelles, un nouveau conte du tapis, ces grands albums cartonnés où le texte est écrit sur le dernier rabat(Seuil). Les musiciens de la ville de Brême,des frères Grimm, illustré par Bruno Heitz (gravures sur bois et très jolis bleus). Le format est propice aux regroupements, un peu à la façon des kamishibaïs.



Pour les Maternelles toujours, Mes animaux du Monde de Clémentine Sourdais (Le Sorbier).Un format carré qu'on développe sur trois côtés pour découvrir une série de biotopes imagés, d'animaux souriants dans des gammes de couleurs ravissantes.A regarder en petit groupe sur une table pour apprendre à nommer les animaux.